L’album Mistral
Gagnant sort en 1986, faisant suite à Morgane De Toi. En
fin de guerre froide, Renaud pond ici quelques unes de ses plus
belles créations. La chanson titre Mistral Gagnant, qu’on
ne présente évidemment plus, Fatigué la dégoûtée ou
encore bien sur Miss Maggie, cet hommage aux femmes, à toutes
les femmes… a part peut être…
P’tite conne se pose là, entre ces quelques chef d’œuvres, au départ comme un
morceau qui complète l’album, là pour occuper la place, pour
passer la barre des dix titres. Une musique pâle, sans grande
inspiration, qu’on pourrait malencontreusement laisser filer si
l’on ne se penchait pas sur le texte, cette écriture merveilleuse,
cette justesse de ton, cette sensibilité que très peu d’autres
que Renaud ont déjà su toucher.
Une écriture réaliste, simplement touchante, le mots juste, là, comme l’épicentre d’une
onde de choque, les images et les émotions s’imposent, sa plume
comme sismographe des activités souterraines, miroir d’une
civilisation inhumaine qui exclue et salit ses propres enfants. Comme
un exemple, une situation parmi tant d’autres, une P’tite
Conne perdue au milieu des vautours, une introduction au dégoût,
à la colère, qui fatigue Renaud le chanteur, et révèle déjà au
monde la face du Renard.
Mais P’tite Conne
c’est d’abord un sourire, un regard, ceux de Pascale Ogier,
actrice foudroyée la vieille de ses 26 ans le 25 octobre 1984.
L’affection, l’émotion, la colère de Renaud dans cette chanson,
sont pour elle, et cette haine comme une vengeance, les mots comme
des coups contre les hypocrites, ces ombres friquées, aristocrates
de la défonce, qui marchent derrière son cercueil, «en
recomptant ses roses qu’il a payé aux prix de sa dernière dose et
de ton dernier cri».
Un seul gros bémol donc dans cette poésie triste et réaliste, une instrumentalisation
indigne d’un tel texte, une musique à la Jean-Luc Azoulay (aka le
fameux Jean-François Porry, et j’assume la référence) dont les
premières notes d’introduction font déjà craindre le pire. On est
rassuré dès que Renaud et ses mots prennent enfin possession du
morceau, éclipsant pour de bon cet accompagnement ringard et
insipide.
Le contexte, l’univers de ce récit, puisque s’en est un, comporte une charge émotionnelle
très forte, presque palpable. Du désespoir à la colère, Renaud de
juge pas ici les toxicomanes, mais il fustige ceux qui profitent et
s’engraissent sur les faiblesses des autres, puis se
déresponsabilisent de leur déchéance. Tout simplement tendre et
humaine, la plume de Renaud touche au cœur, et fait mouche… «Tout
près de Morrison mais pas trop loin de moi».
Le texte:
Tu m’excuseras mignonne
D’avoir
pas pu marcher
Derrière les couronnes
De tes amis
branchés
Parc’ que ton dealer
Etait peut-être là
Parmi
ces gens en pleurs
Qui parlaient que de toi
En regardant leur
montre,
En se plaignant du froid
En assumant la honte
De
t’avoir poussée là
P’tite conne tu leur en veux même
pas,
Tu sais que ces charognes sont bien plus morts que toi…
Tu fréquentais un monde,
d’imbéciles
mondains
Où cette poudre immonde
Se consomme au matin
Où
le fric autorise
A se croire à l’abri
Et de la cour
d’assises
Et de notre mépris
Que ton triste univers
Nous
inspirait malins
En sirotant nos bières
Ou en fumant nos
joints
P’tite conne tu rêvais de
Byzance
Mais c’était la Pologne jusque dans tes silences
On se connaissait pas
Aussi tu me
pardonnes
J’ai pas chialé quand t’as
Cassé ta pipe d’opium
J’ai pensé à l’enfer
D’un téléphone qui crie
Pour réveiller
ta mère
Au milieu de la nuit
J’aurai voulu lui dire
Que
c’était pas ta faute
Qu’à pas vouloir vieillir
On meurt avant
les autres
P’tite conne tu voulais pas mûrir,
Tu
tombes avant l’automne juste avant de fleurir
Et t’aurais-je connu
Que ça n’eût
rien changé
Petite enfant perdue
M’aurais-tu accepté ?
Moi
j’aime le soleil
Tout autant que la pluie
Et quand je me
réveille
Et que je suis en vie
C’est tout ce qui
m’importe
Bien plus que le bonheur
Qu’est affaire de
médiocres
Et qui use le coeur
P’tite conne c’est oublier que toi
t’étais là pour personne
Et qu’ personne était là
Tu m’excuseras mignonne
D’avoir
pas pu pleurer
En suivant les couronnes
De tes amis
branchés
Parc’ que ton dealer
Etait peut-être là
A
respirer ces fleurs
Que tu n’aimerais pas
A recompter ces
roses
Qu’il a payé au prix
De ta dernière dose
Et de ton
dernier cri
P’tite conne allez, repose toi tout
près de Morrison
Et pas trop loin de moi
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Dans la même «veine»:
Alice, Saez (Paris)
Au Creux De Ton Bras, Mano Solo (La marmaille nue)
11 commentaires
[…] chanteur Renaud avait écrit une chanson, que je vous laisse découvrir, pour Pascale […]
La Héroïne a tue tut mes AMIS AMIES le SIDA on 80 je comprend RENAUD
une petite CONNE je la enterez on 82 SEX DRUSG ROCK and ROOL
Une grande chanson de Renaud ! Oui , ce titre méconnu véhicule une émotion et une rage contre la drogue et l’imbécilité humaine qui fait chaud au coeur . L’album « mistral gagnant » dans son ensemble est une grande réussite (et pas seulement commerciale avec ses 1 200 000 exemplaires vendus courant 1986) . Un artiste au sommet de son art à cette époque (le Zénith 1986 et la tournée qui suivit furent de grands moments ) . Sans oublier les cartons de « Miss Maggie » et « Mistral Gagnant » . Merci d’avoir remis le projecteur sur ce chanteur qui nous manque en ce moment .
Magnifique chanson de Renaud, ca faisait longtemps, je vais la réécouter tout de suite.
peut être un prénom, tout simplement… et le pays des merveilles, forcément.
Quel est le sens du titre ?
réécoute la maintenant que tu le sais…
Et moi je ne savais pas que la chanson Alice de Saez parlait de la drogue.
je ne savais même pas que pascale ogier était morte d’od !!dommage, son film ‘les nuits de la pleine lune’de rohmer avec luchinni et christian vadim était prometteur,à la radio, ils avaient dit :morte d’une crise cardiaque car elle souffrait d’une malformation
du coeur … c’est comme le cancer aux poumons d’alain bashung, quand on sait qu’il se shootait durant les années ‘no safe- sex’ and ‘no safe-piquouzes’, ce n’est pas pour salir alain bashung mais le mensonge des médias m’emmerde au plus haut point : certaines personnes sont enscensées alors que ce sont des ordures et la valse aux clichés devant la tv, comme dans la presse ou l’édition de requins me fait frémir, au fait j’ai vu ‘reporters’ de raymond depardon (1980)avant les présidentielles de 1981, sur la deuxième chaine : génialissime !!!renaud pour avoir écrit ‘l’hexagone’, il peut rejoindre les académiciens au panthéon, justement !!!
monaetmoi