Ex-membre du mythique groupe soviétique VV (Vopli Vidopliassova), cette terreur de la mandoline nous offre une musique qui ressemble un peu à la vie : ça part dans tous les sens mais rafraichissante ! « Viens donc écouter le son du bayou urbain », nous dit Féloche.
Mêlant des sonorités électro à sa douce compagne la mandoline, ses chansons aux textes agréables et plein d’humour surprennent et font sourire. La délicieuse alchimie et douce folie de cet artiste bourré de talent feront parler encore plus de lui le 26 janvier 2010 avec la sortie de son premier album « La vie cajun ».
Bonjour Féloche ! Première question très originale : D’où viens-tu et depuis quand fais-tu de la musique ?
Je fais de la musique depuis toujours en fait. Je pense que j’ai toujours fait de la musique. J’ai fait de la trompette quand j’étais petit. Puis MA musique est venue avec la mandoline, la mienne, celle que je joue aujourd’hui. Il y a 10 ans, je suis tombé sur une mandoline, pas celle-là évidemment (en montrant la jolie mandoline qui l’accompagne) c’est celle que j’ai sacrifié dans un clip (rires), tombée dans l’eau. Là, est né Féloche avec la mandoline. Et c’est grâce à cet instrument que j’ai trouvé ma façon de faire, mon style.
A l’instar de M, pour Matthieu Chedid, peut-on dire que Féloche n’existe que sur scène ? Ou bien Félix et Féloche c’est les mêmes personnes ?
C’est plus ou moins les mêmes.
Féloche n’est pas donc un personnage que tu as crée uniquement pour la scène ?
Non non ! Quand j’étais petit, peut-être pas en primaire mais surtout au collège, on m’appelait Féloche. C’était un surnom de potes. Si j’étais une fille et je m’appelais Valérie ça se trouve on m’aurait appelé Valoche et mon nom de scène aurait été Valoche (rires) et du coup pour moi Félix c’est devenu Féloche. Et comme ça vient de cette époque-là, j’ai toujours été un peu « féloche » donc c’est resté.
Maintenant, y a des gens qui me connaissent que sous le nom de Féloche (sourire).
Tu faisais partie d’un groupe de punk ukrainien, les VV. C’est quoi le déclic qui t’as fait passé du punk à la musique cajun ?
Je ne suis pas passé de l’un à l’autre directement. C’est un parcours de musicien. Tu fais plein de choses. J’ai fais de la musique pour des compagnies de théâtre, des pièces de théâtre, des courts métrages,… ça a fait partie de ma vie de musicien. Et c’est une vie de musicien en France. Si j’avais été en Arménie, j’aurai joué du Duduk aux enterrements (rires)
Et c’était facile de passer des plus grands stades ukrainiens à des petites salles parisiennes ?
Le plus grand choc c’était avant, passer des petites salles des cafés avec 10 personnes au stade (rires) donc là ça va. J’ai vécu ce truc de folie dans ma vie, et je ne pense pas que ça puisse arriver. Faut pas délirer, les stades c’est Johnny (rires).
Pour dire vrai, je t’ai découvert l’année dernière. On m’avait dit justement « Tu vas beaucoup aimer, Féloche c’est une belle découverte de Philippe Cohen Solal de Gotan Project ». Comment s’est faite cette rencontre avec Philippe ?
Philippe Cohen Solal c’est le producteur de l’album. Et ce qui est drôle c’est que la rencontre s’est faite via myspace. Il avait un projet solo en dehors de Gotan Project, c’était de la musique country. Il avait enregistré à Nashville et quand je suis tombé la dessus, j’ai adoré ! Ca s’appelle The Moonshine Sessions et je ne savais pas qui était derrière. Et je le demande en « friend », à l’époque des friend de myspace (rires) puis je lui dis que j’adore beaucoup et il me répond pareil : J’adore ce que tu fais, j’aime beaucoup, et puis il signe. Moi j’avais même pas signé mon message j’ai juste dis « j’adore » (rires). Donc il signe Philippe Cohen. Je cherche dans google et je vois que c’est un des Gotan Project et il a un label. Je lui envoi un disque et « La Vie Cajun » c’est le titre qui a tout déclenché pour lui.
Féloche – La Vie Cajun
Que ça soit sur scène ou en écoutant ton album, on sent que tu ne te contentes pas de taper dans une fusion de styles. Au contraire, tu les personnifies à ta façon. Peut-on parler d’un style « Féloche » qui est en train (ou si c’est déjà fait) de se créer, comme l’a fait Gogol Bordello avec le Gypsy Punk…
(sourire) ça me fait plaisir que tu me parles de Gogol Bordello
… Avec « la vie cajun » c’est bien la naissance d’un nouveau style « Féloche » ?
C’est vrai qu’en chanson, dès que tu commences à faire des concerts, on te demande « Dans quels trucs tu veux t’inscrire ?« . C’est compliqué ! Mais je chante en français alors que c’est pas de la chanson française traditionnelle qu’on a l’habitude d’entendre. C’est différent.
Peut-être que ça donne un petit son nouveau, le son du « bayou urbain », moi je l’ai appelé comme ça parce que t’es obligé de te définir. Tu fais du marketing sauvage sur myspace
Et la musique cajun ? Qu’est ce qui t’as intéressé dans cette musique ?
J’en écoutais, chez mes grand-parents, quand j’étais petit et je trouvais ça marrant. Ils écoutaient plein de musique du monde. Mais ça m’a fait l’effet de langue française enregistré, des premiers disques, dans les années 30 et enregistré comme dans un glacier. Des siècles et des siècles, et quand on ressort ça, j’ai trouvé comme une poésie des rêves quand on voyage dans le temps. Donc pour moi, c’est la poésie de cette langue et des mots, comme une sélection naturelle … C’est Darwin (rires). Qu’est ce qui reste de la langue française après un encerclement anglophone et ces siècles où ils se planquaient pour parler français.
On sent aussi, dans ta musique, qu’il y a une forte attache à la Louisiane.
Ah oui (grand sourire) ! C’est un endroit qui me faisait rêver, j’avais pas eu les moyens ni l’occasion avant d’y aller. Et puis quand on rêve d’un endroit, pas forcément pour y aller, en rêve il existe dans ta tête…
Même ta mandoline elle vient de là bas, non ?
Absolument ! La musique, après, c’est la mandoline qui me l’a déclenché, l’écoute de cette musique très très étendue. Tu vas de la musique cajun au blues, de la country au bluegrass. C’est vraiment un coté « racine ».
Et pourtant, pour ton album, y a un petit coté délire psycho-déglingo-punk. C’est en souvenir au passé et ces années avec les VV ?
Il y a de vieux restes des VV.
Donc, ça n’a était même pas un nouveau départ ?
C’est une continuité de tout ce que j’ai vécu. C’est un album très personnel que j’ai fait tout seul chez moi. Je ne suis pas allé en studio, j’ai tout enregistré et mixé chez moi. Je ne parle pas d’autres choses finalement.
C’est sûrement ça qui donne à cet album cette vision que ta musique c’est comme la vie finalement : ça part dans tous les sens, ça ne prend pas le même chemin…
Carrément. Je crois que dans la vie, y a de tout. Si un disque c’est pas un peu la vie, c’est con. Même si je ne fais pas un disque pour que ça plaise aux gens, je m’en fous. Enfin si ça plait c’est génial. Mais je fais un disque parce qu’il y a une nécessité de le faire. Quand t’es un artiste t’as pas le choix, c’est ta raison de vivre donc tu ne peux parler que de ta vie. Et automatiquement ça va parler à quelqu’un parce qu’on est tous des êtres humains (rires).
Sinon, pour un premier album, es-tu pleinement satisfait du résultat ?
C’était une souffrance un petit peu de le faire parce qu’il a fallut le finir et ça c’est hyper violent. Finir un disque c’est tout d’un coup se dire « Et là j’ai plus ces trucs de névroses de travailler dessus » C’est génial de travailler dessus, t’as jamais fini, tu rends pas ton devoir et ça peut durer des semaines.
On retrouve deux duos sur ton disque dont un avec Nora Arnezeder. D’où t’est venue l’idée de reprendre « Singin’ in the rain » et comment s’est faite ta rencontre avec Nora ?
C’était un truc assez drôle. En fait, moi j’ai trouvé ça drôle. J’ai été choisi, parmi plein de personnes, pour faire la reprise Singin’ in the rain pour le parfum de Guerlain qui s’appelle Idylle, et l’égérie est Nora Arnezeder. Je trouvais ça dingue qu’ils fassent appel à moi et ils voulaient un truc très spécial et j’ai trouvé ça osé de me demander de faire une musique de parfum (rires). Donc la rencontre avec Nora s’est faite à partir de là, puis on s’est revu plusieurs fois. Je trouvais qu’elle était super généreuse et motivée dans le travail. Et je fantasmais d’en faire un « vrai » duo. La belle et la bête ! Évidemment je suis la bête (rires)
La première date arrive bientôt ! On te retrouve le 27 janvier à Paris à la Boule Noire. T’as prévu une belle tournée « féloche » pour défendre cet album ?
Je suis hyper content, y a déjà des dates qui arrivent. On va y aller pour défendre sa musique. Défendre ?!? C’est un peu con de dire défendre, OFFRIR ! Mais c’est aussi la défendre parce que des fois on se perd, il faut toujours garder le cap.
Et la promo, il faut bien s’y soumettre ou c’est un vrai plaisir ?
Je trouve ça super ! Parce qu’en fait, ça permet de mieux comprendre ce qu’on fait soi-même. Je peux te dire que les questions se répètent (sourire) et à chaque fois je trouve une réponse un peu différente qui est plus claire et parfois je m’embrouille (rires). Et je trouve ça hyper intéressant parce que ça me permet d’expliquer ma musique, c’est important.
Je suis fier de ce disque et c’est pour ça que je dis le défendre parce qu’on est dans une époque où on dit souvent que le disque est mort et franchement, je ne pensais pas pouvoir faire un disque (rires), le temps qu’il arrive ça n’existera plus (rires). Ouf ça existe encore.
Quelques petites questions avant de finir :
– Dernier coup de cœur musical ? J’ai adoré la BO du film « Max et les Maximonstres » de Karen 0 (Karen Lee Orzolek, chanteuse des Yeah Yeah Yeahs) et la musique elle est géniale ! Les mômes qui chantent, cette pop-folk déglingue, c’est extra (sourire).
– Dernier concert auquel t’as assisté ? Quand tu joues, tu vas moins en concert. Sinon, je dirais John & Jehn, j’ai joué avec eux donc je suis parti voir leur concert.
– Dernière belle rencontre ’musicale’ ? Rencontre musicale humaine ? Je pense que c’est celle avec Philippe Cohen Solal. On s’est compris, et c’est une belle rencontre parce qu’il m’a donné confiance en moi. Et dans le même genre, y a Dr John. C’est pareil qu’un monsieur comme ça aime ma musique et qu’il soit d’accord pour enregistrer un duo, ça veut dire que ça lui plait.
Et si Féloche était un instrument ? (sans qu’il hésite) C’est la mandoline mon gars !
Un artiste ou un groupe de rêve avec qui partager la scène ? Allez j’ose le dire (sourire) Prince !
Et sinon comme héros tu seras qui ? Batmannnnn (rires)
Merci beaucoup Féloche pour cette interview et au plaisir !
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Accompagné de Léa Bulle (Accordéon-trompette-samples) et de Christophe Malherbe (contrebasse), Féloche et sa machine électro-cajun se met alors en marche et part en tournée partout en France :
27/01/2010 : Paris @ La Boule Noire
29/01/2010 : Poitiers @ Le Confort Moderne // Nuits Zébrées Radio Nova
12/02/2010 : Sannois @ EMB (+david walters)
13/02/2010 : Avignon@ Les Passagers du Zinc (+ Carmen Maria Vega)
20/02/2010 : Marseille @ Le Poste à Galène
24/02/2010 : Lille @ La Péniche
25/02/2010 : Châtenay-Malabry @ Le Pédiluve
27/02/2010 : Les Houches @ l’ Espace Olca (+ Hugh Coltman )
12/03/2010 : Bordeaux @ Espace Tatry
19/03/2010 : La Chapelle sur Erdre @ Le Jam
20/03/2010 : Saint Germain en Laye @ La Clef (+ Loïc Lantoine)
24/03/2010 : Paris @ La Maroquinerie
08/05/2010 : Saint-Mathieu @ Festi Duo
17/06/2010 : Flers @ Festival Les Vibrations
Un grand merci à Thomas d’Ivox, sans qui cette interview n’aurait pas pu avoir lieu, et à Joelle pour ses photos.
Un commentaire
Prenez :
– une ex rock star soviétique qui a rempli des stades de 80000 personnes
– une fille a l’air un peu illuminée qui donne l’impression qu’ils sont plusieurs dans sa tête
– un type qui a piqué les lunettes du professeur tournesol
– un bucheron qui porte la chemise de Charles Ingalls et des chaussures vertes
– un violoniste classique en costume droit et chaussures vernis
Ajoutez de la musique cajun
Laissez les sauter ensemble sur scène
Admirez
Y’a comme une sorte d’illogique non ?
Mais bon, ça a l’air fun !
Alors, sautons avec eux !
(Oui, Féloche en live, ça vaut le détour !)