Les raves
Jeune parisien, Emmanuel Dauchez, découvre les raves en 1991 et se lance dans l’aventure d’un mouvement qui déferle comme un raz-de-marée sur la capitale. On le découvre pour ses premières fois aux platines aux afters du dimanche matin au pont de Tolbiac et aux raves du Bourget avec le collectif Psychiatrik. Puis, il participe à la grande rave de Bercy.
C’est à ce moment-là qu’il choisit son pseudo qui est celui de Gérard Lanvin dans Les frères Pétard, le film d‘Hervé Palud.
Ses sets sont alors plutôt techno-transe mais très vite, influencé par des labels comme PCP ou Industrial Strength, ses mix deviennent plus sombres, plus durs. Il apprend très vite et sa technique commence à faire parler hors des frontières. En 1995, il participe à Zurich à une rave qui rassemble quinze mille personnes et rencontre Lenny Dee, le boss d’Industrial Strength qui lui permet de sortir son premier maxi Memory, et de participer à une compilation Paris hardcore. Sa carrière est lancée, plus rien ne l’arrêtera.
L’homme illustré
Impossible de parler de Manu sans parler de son apparence. Bien sûr, cela n’aurait aucune importance s’il n’avait décidé d’inscrire jusque dans sa chair son admiration pour le plasticien suisse Giger, créateur de l’alien de Riddley Scott et du concept inquiétant de Biomécanique. Il ne s’exhibe pas. J’ai dû le voir mixer deux ou trois fois par an depuis dix ans et je n’ai jamais vu son tatouage, considéré comme le chef-d’œuvre de Tin-Tin, le tatoueur parisien, mais comme chacun a vu la photo de Yann-Artus Bertrand dans son album Les français, on est bien obligé d’y penser.
Oui, c’est sombre, oui, cela a à voir avec Edgar Poe, Lovecraft et une charogne de Baudelaire ou les machines infernales de La cité des enfants perdus de Jeunet et Caro. C’est le hardcore, il lève le rideau sur les pulsions morbides de l’âme humaine et son côté obscur. Pour Manu le malin, l’aboutissement est le triptyque Biomechanik dont le dernier opus comporte un dvd enregistré au musée Giger, à Gruyère. C’est glauque et c’est beau.
Le métronome humain
Techniquement, c’est un champion, il peut mixer avec quatre platines mais il sert le son avant tout. Il ne fait pas le beau : « regardez comme je suis fort », il préfère se balader là où on ne l’attend pas, faire un set techno de huit heures sous le pseudo de The Driver ou un concert à l’Opéra avec René Koering, compositeur de musique contemporaine, et l’Orchestre Philharmonique de Montpellier, accompagné de son jeune complice Torgull. Il n’est pas qu’un métronome humain qui fait de la musique qui rend sourd, c’est un vrai musicien. Il s’est même essayé au rock avec le groupe Palindrome où il écrit ses textes et chante.
Le cœur a ses raisons
Comment expliquer pourquoi on l’aime ? Est-ce qu’il est un prêtre vaudou qui t’aide à extirper le monstre tapi dans ton cœur ? Je ressens le paradoxe d’utiliser des machines pour revenir à l’essence même du rythme, on pourrait aussi bien danser sous la lune avec un tambour ! En Afrique, on soigne avec les percussions. Je ne sais pas si c’est le cas ici mais quand le set est fini, on lui crie toujours merci ! Merci pour la sueur et la transe, merci pour nous avoir fait vomir les toxines mentales qui s’accumulent dans cette vie si dure, merci pour ce lien si particulier entre lui et nous, son public, et depuis si longtemps.
Merci.
Discographie :
-1995 : Memory
-1995 : Paris hardcore
-1996 : Hardcore vol 2 (Fairway record)
-1997 : Biomechanik
-1999 : Biomechanik 2
-2001 : Astropolis mix
-2002 : Fighting spirit
-2003 : Rions noir avec Palindrome
-2005 : Biomechanik the final chapter
-2007 : On the way home
5 commentaires
Il serait bien de mentionner pour les années 90, Fredy (Président du MC BMC) qui a jouer un rôle important à cette époque en organisant des afters au Rock Avenue à Livry Gargan, des raves…puis cette fameuse rave du Bourget !
Un bien bel article et une belle histoire musicale pour un excellent artiste!!!!ne change rien!!!la bizzz et big up!!!!
En pensant aux Tolbiac des afters hier je me disais que ce serait une bonne année pour aller réécouter Manu, où le Driver, peu importe, j’aime les deux, une part de moi est sans doute rester à Tolbiac, où au Néo, où peut-être dans ces salles que je ne saurais retrouver aujourd’hui, où Liza ouvrait nos portes avant que le Malin nous aide à les défoncer pour de bon.
Une période dingue et géniale, nous n’arrêtions, jamais, j’étais partout dans son son, Zurich, Rotterdam, les Dragons, les premiers tékos, le tout premier Astropolis et celui d’il y deux ans encore et des bornes à n’en plus finir, des kilomètres de son à travers l’Europe, pour l’entendre.
La dernière fois c’était dans le sous sol du Vauban à Brest au lendemain d’Astropolis, il y deux ans et là le manque se fait sentir.
Un article forcement attendu quand on sait ton attachement de longue date et ton enthousiasme jamais démenti pour Manu le malin. On ne pouvait être déçu, il est à la mesure de ta passion. Excellent.
Très bonne Bio de ce grand Mr !!
Merci Patty, t’es forte 😉