Les productions Asterios ont eu la merveilleuse idée de réunir dans un lieu étonnant deux femmes, mi-chanteuses, mi-poètes, huit lundis de suite. C’est donc au Zèbre de Belleville que nous étions ce lundi 23 janvier. L’ambiance de la salle sent le cabaret imaginaire et le cirque abandonné.
La Demoiselle Inconnue entre sur scène. Elle a des allures de Gavroche féminin et dégage une sensualité suave et souterraine. Elle ouvre le bal en nous expliquant « Si tu me dis que tout est gris, je rigole, je colorie ». Et c’est ce qu’elle fait. Pendant quarante-cinq minutes, à coup de mots et d’images, La Demoiselle va mettre de la vie et des nuances dans les tracas du quotidien. Elle nous chante Il m’plait pas, et pourtant n’arrive pas à s’en défaire, elle touche à la beauté des coups d’un soir avec Si Demain. Elle rend ses lettres de noblesse à Britney Spears, dans une reprise en duo avec une poupée Barbie. Barbie dont elle se servira de médiator…
On poursuit avec le touchant Milles Bouches, chanté a capella et le sauvage La Louve, joué à l’archet sur une guitare qui gronde. Elle continue avec Gros Dégueu, qui pourrait presque être thérapeutique pour toutes les traumatisées des frotteurs du métro. La Demoiselle Inconnue nous offre ensuite une échappée poétique sur Un Endroit Qui N’existe Pas. Elle joue avec les sens pour créer des rêves. C’est beau, on en voudrait plus souvent des moments comme celui-là. Elle décortique le désir et sa puissance dans Ma Retenue et nous offre une ode aux petites bêtises avec Les Pirates. Elle est rappelée et nous fait cadeau d’un dernier moment de poésie chantée, à travers l’histoire d’une femme âgée, délaissée par son mari, et qui, selon notre chanteuse, écouterait Dalida. Envoûtante Demoiselle Inconnue, qui parle au creux du cœur et du ventre.
Après une courte pause, Estelle Meyer entre en scène avec ses musiciens, sa ménagerie et ses contes gitans. Si La Demoiselle Inconnue pouvait être une eau furieuse, parfois calme, souvent riante, Estelle Meyer incarne le feu et embrase la salle de sa voix chaude. Le set s’ouvre sur un poème à propos d’oiseaux qu’elle ne connait pas. Vient ensuite le puissant Septembre, qui permet de prendre la mesure de l’univers de la douce amazone. Celle-là nous propose de suivre quelqu’un d’inconnu et nous emmène aux Invalides pour une rencontre violente de sensualité. Estelle aussi chante La Louve et nous offre une jolie variation du thème. La voix se fait rauque et profonde.
Après un poème écrit sur un dépliant pour de la gelée royale, la belle nous présente son Amoureux. Comme elle n’est pas venue seule, elle fait le tour du bestiaire fantastique qui trône à ses pieds. Ce soir, c’est la chouette d’Athéna qui tient compagnie à une girafe, une chatte à paillettes côtoie un lotus et des coquillages. Le tout est encadré par trois lampes en forme de lapin, de lune et de champignon. Nous sommes dans un conte… Et comme dans un conte, notre bonne fée nous pousse à faire des vœux. Mais Estelle Meyer a un rapport particulier, assez libre avec le sacré. Elle nous rassure : « On est souple avec Dieu, on alleluye qui on veut ». Elle invite Camilia au violon pour un superbe Chant Des Étoiles, puis nous emmène dans une forêt magique pour accepter qui l’on est. Ce voyage féerique se termine par le très tribal Amawilé qui achève cette jolie quête du merveilleux.
La Demoiselle Inconnue rejoint Estelle sur scène pour un dernier rappel émouvant de douceur et de nostalgie. Français et espagnol se marient dans une belle intimité, comme les voix des deux interprètes. Entre profondeur et sensibilité, elles racontent une peine sur un ton onirique. On en sort apaisé, un peu amoureux, avec quelques étoiles au creux de l’oreille. Courez-y tous les lundis, c’est exceptionnel.
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